dimanche 11 décembre 2016

Beautés de la mélodie française | Récital Stanislas de Barbeyrac, Amphi Bastille 05/12/2016

Lundi dernier, j'ai eu le grand plaisir d'aller entendre l'un de mes chanteurs préférés, Stanislas de Barbeyrac, dans cet exercice rare et difficile qu'est le Liederabend. Pour l'occasion, sortie entre filles: j'y ai amené mon aînée de 12 ans, pour qui c'était une première expérience de la mélodie et du Lied.

Le programme était aussi éclectique que cohérent: chronologique et centré autour du thème de l'amoureux mélancolique. On débuta fort, avec le merveilleux Adélaïde de Beethoven, choix audacieux car la tessiture de ce Lied est tendue (je parle d'expérience). Le phrasé noble et clair du chanteur y fait merveille, posant admirablement le décor pour la suite, dont le merveilleux cycle "À la bien-aimée lointaine", rêveur et viril à la fois, tout en nuances Sturm und Drang. Une réussite, même si j'aurais aimé un piano un peu plus charpenté pour du Beethoven.

On enchaîne par ce petit bijou qu'est l'Absent de Gounod. Et si j'ai été séduite par le très beau verbe allemand de Stanislas, là en français, c'est tout bonnement fantastique. Cela fait si longtemps qu'on attendait un chanteur dont la diction rende justice à ce répertoire! À part Alagna, et il ne s'est guère aventuré dans la mélodie, personne aujourd'hui ne prononce notre langue aussi bien. Et quand en plus le chanteur tisse un écrin de couleurs et de dynamiques pour créer une atmosphère qui sert si bien le texte, c'est un vrai bonheur. Les mélodies de Duparc sont de la même eau: quelle Invitation au voyage, radieuse, mélancolique mais jamais maniérée, dite avec cette voix franche et si bien assise dans le médium et en plus délicieusement accompagnée par le piano tendre et sophistiqué de Yoan Héreau. Vraiment top, dixit Gremlin 1 avec un grand sourire (elle suit mieux quand c'est en français).

J'ai ensuite découvert avec intérêt les mélodies de Roger Quilter et Ivor Gurney, bien que je leur préfère de loin les deux chansons de Britten conclusives, même si j'ai senti le chanteur, toujours impeccable musicalement, un peu moins à l'aise avec les textes cette fois-ci (une mignonne inversion de texte dans The Salley Gardens de Yeats m'a fait sourire).

Très applaudi, Stanislas nous offre aux bis un très bel air de Max du Freischütz de Weber (cela me donne encore plus hâte d'entendre son Tamino en janvier!) et un défi (c'est lui qui le dit): l'air de la Fleur. Et là, REVELATION! C'est la plus belle interprétation que j'aie entendu depuis Alagna et Gösta Windberg. Et ce pianissimo final! Je lisais récemment une interview de Stanislas où il disait vouloir se concentrer sur les répertoires français et allemand. Ce récital m'a convaincue qu'il a 100% raison. Je m'en vais donc rêver d'un Don José complet, d'un Pelléas, d'un Hoffmann... mais aussi de Don Carlos (en VF bien sûr). Il faut aimer les défis.