mardi 28 juin 2016

A Very Moving Werther | Royal Opera House Live 27/06/2016

In these sad times of Brexit, I have decided to write the review of last night's Werther live at the movies in English. Readers will I hope be indulgent for the odd mistake.

So yesterday I went to my local suburban Paris movie theatre to see the latest version of Benoît Jacquot's production of Werther, this time with the debuts of Joyce DiDonato and Vittorio Grigolo. That production is well-known to me and I like it very much : I saw it in Paris a few years back with Jonas Kaufmann and Sophie Koch (Plasson conducting) and it was one of the best evenings I ever had at the opera. Therefore I was not worried about not liking the staging and just very curious to hear two new leads in that work which is among those I know best, along with Tosca and Trovatore.

Well, I had a great evening. For one, nothing can go wrong when my beloved Simon Callow is host! That voice is so part of my teenage days! He was Mercutio on an old audio tape I had back then, and it was lovely to hear him again.
In the pit, Tony Pappano and the ROH orchestra were awesome. That energy, that tension! Sir Tony is not quite as subtle as Plasson, but still he managed to convey the Sturm und Drang drama so well that I got goosebumps.
The comprimari were all lovely too, especially a delightful François Piolino as Schmidt and a lively, sweet-voiced Sophie by young American soprano Heather Engebretson. It was also moving to hear the Bailly of Jonathan Summers, returning to the work after having been Albert on the same stage in... 1979!

OK, I admit it, I wanted to go mostly for Vittorio Grigolo, whose wonderful French diction I had discovered in his Met Hoffmann, and who was bound to make a very handsome Werther physically anyway (I have a soft spot for Vittorio, as you may have guessed). Well, he was handsome alright, though I hate that beard which makes him look like a younger, slimmer version of Pavarotti and got far too many closeups on his perfect teeth for my liking. Vocally he was quite satisfactory too, less over-the-top than he is wont to be, with exquisite messa di voce, delightful colouring and notable volume when needed. But on the acting side, I was perplexed. For one thing, Vittorio needs lessons to learn how to use his arms. His routine "arms straight along my sides", then "stretched forward pleadingly" and  "hugging myself" gets tiring after a while. Perhaps because he is always batting his arms around and taking so much space on stage, I ended up finding his Werther almost dislikable. He was certainly self-centered to a fault, almost brutal, bullying DiDonato's delicate Charlotte into loving him back... of course, this aspect is part of the character, but I had never quite felt it so vividly. I only found him endearing at the end, when his apologetic, suddenly appeased death scene finally managed to touch my heart.

But the one who brought tears to my eyes was Joyce DiDonato's Charlotte. Although I initially had trouble with believing in her as a young girl in Act 1, I was totally convinced from Act 2 onwards. Her bright, vibrant voice managed to convey all the complexity of Charlotte's feelings, with superb belcanto coulouring and a classy French diction. And then I was blown away by her letters scene in Act 3. That was so intense, the cataclysm of Charlotte's turmoil flowing from her like lava from a volcano, the voice stretched to its limit, as if throwing all caution away... absolutely amazing. I want to hear that again, live next time!

So here you have it: it was just one of those evenings when you come to be moved by the tenor and end up moved by his leading lady. And hey, I love that!

Photos copyright ROH.

lundi 13 juin 2016

Mariaaaaaaaa! | Traviata | Opéra de Paris 11/06/2016

Il est des soirées où on assiste à des miracles. Samedi soir, à l'Opéra de Paris, c'en était une. Car ce soir-là, sur la scène de Bastille, on a pu entendre la Violetta de Maria Agresta. Et elle tient du miracle. Souffle infini, rondeur du timbre, ligne divine, aigu triomphant, toutes les qualités de cette merveilleuse chanteuse mises au service d'une extraordinaire incarnation. De bout en bout, elle EST la Traviata. Dans la parole, extraordinairement vraie, dans les gestes, si naturels, dans l'émotion, immense. La plus belle Violetta qu'il m'ait été donné d'entendre. Son duo du 2e acte avec Germont père fut un moment de grâce que je ne suis pas prête d'oublier : tant de vérité, de justesse dans les sentiments, j'en suis encore remuée. Alors merci, merci, Maria Agresta, pour tout ce que vous nous avez donné ce soir-là.

Et merci également au merveilleux chef verdien qu'est Michele Mariotti. En communion avec sa chanteuse, il tire de l'orchestre de l'ONP des couleurs, des transparences inouies. On entend des détails que l'on n'avait jamais entendus! Et puis, ces mains... c'est bien la première fois que je passe autant de temps à regarder le chef plutôt que la scène.
Il faut dire que la mise en scène de Benoît Jacquot est un ratage: anodine, statique jusqu'à l'ennui, sans idées à part la référence à l'Olympia de Manet et au lit de la Pavia, et surtout sans la plus petite once de direction d'acteurs! Ces choeurs en rang d'oignons... Vergogna! Quand je pense qu'on a rangé dans les cartons l'extraordinaire Traviata de Marthaler...

Belle prestation de Bryan Hymel en Alfredo, qui se sort très élégamment d'un rôle que l'héroïsme de sa voix ne lui rend à mon avis pas intrinsèquement naturel et nous gratifie d'un superbe contre-ut à la fin de sa cabalette. Cet Alfredo, dont le côté fruste va avec le personnage de jeune provincial monté à Paris, sait en outre émouvoir dans la grande scène du 2, où ses remords sont déchirants.

Enfin, Željko Lučić en Germont Père est, comme toujours, très bien chantant s'il n'est pas excessivement sonore, tout en noblesse et en nuances châtiées. En plus, on lui a restitué la cabalette de Di Provenza, inexplicablement retirée à Tézier lors de la 1ère édition. J'en serais presque consolée d'avoir dû rater Simone Piazzola que je devais entendre au départ avant d'être forcée de modifier mes dates.

Bref, à défaut d'une soirée de théâtre, une grande et belle soirée de chant que je ne suis pas prête d'oublier. Et pour vous en donner un écho, le "Libiamo" de Bryan Hymel et Maria Agresta peut s'écouter ici https://youtu.be/53i7E_hWQCQ

dimanche 5 juin 2016

Chères images | Simon Boccanegra, Wiener Staatsoper, live-stream 04/06/2016

Hier, j'ai pour la première fois payé pour un live-stream sur ma tablette. Et bien ce sera sans doute la dernière. Le streaming, quand c'est gratuit, c'est pratique pour ceux qui ne peuvent pas aller voir toutes les représentations qui les font rêver. Ce n'est qu'un pis-aller, mais bon, quand c'est gratuit on ne râle pas. Mais là, 15 euros pour quelque chose d'aussi médiocre visuellement que ce Boccanegra que proposait hier le Wiener Staatsoper, franchement c'est abuser. Mieux vaut la radio!

En effet, j'ai rarement vu une production aussi indigente que cette reprise d'une mise en scène de Peter Stein. Costumes hideux et peu seyants, lumières nulles, décors au rabais avec force rideaux qui s'ouvrent et se ferment, zéro direction d'acteurs, pas d'idées et... pas de mer! Le comble pour une oeuvre aussi liée à la mer ligure que Boccanegra! Oser proposer ce machin en streaming payant, franchement! En plus, l'orchestre joue beaucoup trop fort et les choeurs sont aux fraises... que de départs ratés dans la scène de la salle du trône! Indigne de Vienne. Alors que reste-t-il pour justifier ce prix? Eventuellement le cast, qui semblait prometteur sur le papier.

Le Doge de Hvrostrovsky ne m'a pas convaincue. Le style n'est pas verdien, il chante tout pareil et l'incarnation est absente. Je ne parlerai pas de la voix, fatiguée, car il est de notoriété publique qu'il a de gros soucis de santé et c'est tout à son honneur d'assurer autant malgré cela, mais côté interprétation, c'est sans intérêt. Tout le contraire du Fiesco de Furlanetto, noble, déchiré, superbe vocalement: la véritable statue du commandeur de Simon. Je suis d'autant plus convaincue d'aller l'écouter en Filippo II à la Scala l'an prochain.

Superbe également, mais ce n'est pas nouveau, le Gabriele Adorno de Francesco Meli, le meilleur depuis Carreras. Ligne, timbre, classe, il en impose... notamment côté volume: il a du mal à ne pas écraser le Doge et sa fille dans les ensembles, mais passe facilement la rampe et l'orchestre. Hélas pour lui, il est empêtré dans un costume fort laid et bien peu flatteur pour la silhouette et livré à lui même côté jeu d'acteur.

La vraie mauvaise surprise du cast, c'est l'Amelia de Barbara Frittoli, qui se bat avec des registres désormais totalement désunis, crie ses aigus, tube son grave et cherche en vain à masquer les trous dans sa tessiture. C'est dommage car le timbre reste beau et l'artiste intègre et attachante. Mais un Boccanegra sans Amelia...
Je finirai par une mention pour le très beau Paolo de Plachetka, un futur grand qu'on a hâte d'entendre dans un premier rôle.

En bref, une production de routine qui ne justifie en rien le prix demandé pour la voir sur une tablette. Si le Wiener Staatsoper veut faire payer, qu'il en donne aux spectateurs pour leur argent!