mardi 30 décembre 2014

Mes voeux pour 2015

En cette nouvelle année, je forme par écrit mes bonnes résolutions et souhaits pour 2015, ce qui me permettra dans un an de voir combien des premières ont été tenues et combien des seconds réalisés.

Les voici :

1) Avoir écouté TOUTES les oeuvres de Verdi. Avec l'aide de YouTube, c'est en bonne voie. Normalement, d'ici mars, c'est fait!

2) Voir Francesco Meli live. Peut-être en juin dans Carmen à Milan, si je peux me caler un déplacement à ce moment là, ou qui sait, pour la saison 2015-2016 de l'Opéra de Paris?

3) Me réabonner audit Opéra de Paris. Pour ne pas rater le Trovatore de Netrebko qu'on nous promet en décembre 2015 et le Lohengrin de Kaufmann dont tout le monde parle!

4) Profiter à fond de mon abonnement à la Philharmonie de Paris, et partager avec vous mes impressions suite à ces concerts. Au programme : beaucoup de Berlioz, Esa Pekka Salonen, Sabine Devieilhe, Franco Fagioli et quelques beaux concerts symphoniques et de musique sacrée.

5) Passer le réveillon 2015 à la Fenice. Pour passer une dizaine, il me faudra bien ça...

Et encore et toujours, aimer la musique et les artistes et vous faire partager mes bonheurs!

BONNE ANNÉE 2015 À TOUS!

dimanche 28 décembre 2014

Petit catalogue des oeuvres oubliables (ou pas). I Lombardi alla prima crociata - Verdi

Je continue ma découverte de certaines oeuvres du corpus verdien que j'avoue globalement ignorer. Parfois je tombe bien (I due Foscari, qui est pour moi un chef d'oeuvre méconnu), parfois moins. C'est le cas pour I Lombardi.

Je ne connaissais que deux extraits de cet opéra, le fameux air "La mia letizia infondere" et le duo Oronte/Giselda, que j'avais découvert dans l'album "Verdi per due" d'Alagna et Gheorghiu. Les deux sont fort beaux, aussi me disais-je hier soir que cette version du Regio de Parme trouvée sur YouTube et faisant partie de l'intégrale Verdi du label C-Major, était de nature à me faire passer une bonne soirée.

Et bien en fait, non. I Lombardi n'est pas un chef d'oeuvre, il est peu joué pour de bonnes raisons et franchement je n'irai pas le réécouter.

Tout d'abord, l'intrigue est si inepte (vendetta sur deux générations, coïncidences ridicules, ermites, conversions, assassins et autres anathèmes) qu'à côté, même celle de Trovatore est cohérente! Ce n'est pas peu dire. Les personnages n'ont aucun profil psychologique, ce ne sont que des archétypes (héroïne en détresse, ténor amoureux, traître basse...), donc on remballe toute direction d'acteurs. Du coup, impossible d'en faire une mise en scène qui soit autre chose qu'un statistique troupeau de chanteurs devant un fond, avec des costumes plus ou moins exotiques.

Ensuite, la musique n'est vraiment pas du meilleur Verdi: et que je te fais sonner la fanfare, et dzing bloum bloum et oumpa-pah pour finir les morceaux. Ça lasse. Et puis quelle idée de mettre deux rôles de ténor dans un même opéra, m'enfin??? Alors oui, il y a de très beaux choeurs (les choeurs sont même à mon sens le principal personnage de l'oeuvre), un ou deux beaux airs, un beau duo, une belle scène de décès du ténor précédée et accompagnée d'un magnifique solo de violon... mais c'est un peu maigre quand même!

Cela dit, la version C-Major n'est pas mauvaise, loin de là. C'est bien chanté, Dimitra Theodossiou a la voix qu'il faut pour le rôle (il faut une Abigaille), Pertusi en impose malgré un maquillage bien ridicule, Meli réussit toutes ses scènes, qui sont autant de "crowd pleasers" et se taille un franc succès à l'applaudibravomètre. Et le choeur du Regio de Parme est somptueux. Mais à tout prendre, je préfère largement Nabucco.

Vous ne connaissez pas non plus cet opéra et voulez le découvrir aussi et vous faire votre avis? Voici le lien. Je vous préviens, c'est sous-titré en batave et en décalé en plus, c'est un peu pénible le temps de s'habituer.

Verdi - I Lombardi alla prima crociata - Callegari : http://youtu.be/SEZtcTIbHPk

À bientôt pour une prochaine découverte!



vendredi 26 décembre 2014

Le crossover, ce fléau?

Donc hier Jonas Kaufmann est venu chanter ses opérettes des années 30 dans le show d'une bimbo blondasse sur la télé allemande. Il a même fait un duo avec elle. Et que je te fais des oeillades langoureuses, et des sourires en coin... franchement, je déteste. Il y a 15 ans, les 3 ténors me sortaient par les yeux, les Mariano d'Alagna m'ont bien saoulée... et maintenant c'est Jonas qui s'y met! AU SECOURS!

Voici l'objet du délit : Jonas Kaufmann & Helene Fischer : http://youtu.be/oIo-Z7-RLFs

De façon générale, je ne suis pas crossover. Peu de tentatives ont été couronnées de succès. Je n'en sauve que 3, les voici:

- Anne Sophie Von Otter et Elvis Costello, album "For The Stars"
- Sting qui chante Dowland
- Miss Sarajevo de U2/Pavarotti

Le reste beurk, beurk et archi beurk.

Pour la nouvelle année, je forme donc le souhait que M. Kaufmann arrête de se prendre pour un crooner barytonnant et se rappelle quel merveilleux ténor d'opéra il sait être, quand il le veut.

dimanche 21 décembre 2014

Fidelio à la Scala de Milan, version Live

Voilà. C'était hier, ma première soirée à la Scala, pour un de mes opéras préférés : Fidelio de Beethoven.

Mes espérances étaient grandes après une première en demi-teintes vue à la télévision, avec un Vogt pas en forme qui se fit porter pâle à la représentation suivante (remplacé pour une pige de luxe par Jonas Kaufmann). Et bien elles ne furent pas déçues, j'ai passé une merveilleuse soirée.

Dès l'ouverture, pourtant pas ma préférée (Léonore 2), la sonorité de l'orchestre, portée par cette merveilleuse acoustique de la Scala (à côté de laquelle Bastille donne envie de pleurer), m'a prise aux tripes. Barenboim sait faire vivre Beethoven, ce n'est pas un scoop, quel rythme, quelles couleurs!

La mise en scène ne me dérange pas, je l'ai déjà dit. Si elle ne m'emballe pas particulièrement, elle fonctionne pour moi, je ne la trouve ni laide ni incohérente. En plus, le plateau rend mieux en vrai qu'à la télé. Les effets de lampe de poche au 2e acte sont particulièrement réussis. Et puis la direction d'acteurs est soignée.

Côté chanteurs, je ne suis toujours pas emballée par Mojca Erdmann. La voix est petite, mais ça ne me dérange pas en soi, ce qui me gêne c'est qu'elle est monochrome et que la chanteuse n'a pas d'idées (Bonney, avec une voix également petite, faisait autre chose du rôle!). Son "Oh wer ich schon" est ennuyeux. Oui, elle est jolie et crédible scéniquement, mais ça ne fait pas une Marzelline. Florian Hoffman est bien, je n'ai pas grand chose à en dire, Jacquino est un rôle si ingrat! Je jugerai quand je l'entendrai dans autre chose.

Falck Struckmann toujours affreux: beuglements, Sprechgesang, tout triple forte... ce n'est pas de la musique. "Welch ein Augenblick" mérite autre chose. Kwanchul Youn chaleureux, bien chantant, émouvant. Très beau Rocco, plein de tendresse. Mattei royal, superlatif pour un rôle aussi mineur que Don Fernando.

Passons à nos 2 héros. Kampe n'a pas la voix que je préfère pour ce rôle, je trouve qu'elle manque de métal, notamment dans les ensembles, mais quel investissement! Son Fidelio est crédible scéniquement, elle est engagée, s'arrache, se donne à fond et émeut. J'admire la performance et le don d'elle même de cette magnifique artiste. Klaus Florian Vogt, très en dedans à la Prima, est de retour en forme. Son "Gott" immatériel et le "In des Lebens Frühlingstagen" qui suit sont très réussis, passant sans souci au dessus de l'orchestre, volume et souffle retrouvés, tenant sans difficulté la fin de l'air où tant de ténors peinent. Très émouvant, vraiment. Alors oui, le phrasé est toujours un peu raide, mais c'est un péché mineur. Une bien belle interprétation. La réunion des deux protagonistes dans "Oh namenlose Freude" fut un grand moment, même si encore une fois la mise en scène les fait chanter ce duo à 5 mètres l'un de l'autre. Ils finissent quand même par se tomber dans les bras!

Le choeur final emporte toutes les réserves qui pouvaient rester. La joie, l'allégresse, les applaudissements... et on sort de ce merveilleux théâtre avec un grand sourire et des étoiles plein les yeux, en rêvant de vite y revenir!

mercredi 17 décembre 2014

Billet d'humeur

Mais que c'est saoulant quand on se promène sur YouTube de lire tous ces commentaires de gens aigris qui ne sont capables que de dire d'une soprano: "c'est pas la Callas", d'un ténor: "bring back Luciano" ou d'une basse: "méeuh avec Siepi c'était mieux"!

On ne peut pas, une fois pour toutes, en finir avec les comparaisons à "un sequino" et les "c'était mieux avant"? Mais bon sang, si les chanteurs actuels ne vous plaisent pas, ne les écoutez pas, restez-en à vos vieux vinyles, voire vos vieilles cires et n'en dégoûtez pas les autres!

Moi je me satisfais des chanteurs que nous avons, en acceptant leur singularité, leurs défauts et leurs qualités. Je ne compare pas, c'est stérile, et surtout, l'opéra est pour moi une joie et un plaisir de (presque) tous les instants, et c'est là sa vocation: donner à entendre et à voir du bonheur.

Alors Messieurs les grincheux, "Buonasera, buonasera!"

lundi 15 décembre 2014

Maudits les innocents - création jeune public à l'Opéra de Paris (15/12/2014)

Une fois n'est pas coutume, je laisse aujourd'hui la plume à ma fille aînée, qui a assisté à la création de cette oeuvre à plusieurs mains (jeunes compositeurs du CNSM de Paris) à l'Amphithéâtre de l'Opéra Bastille.

''J'ai aimé cet opéra. La musique n'est pas comme celle qu'on entend tous les jours: l'orchestre était petit: une flûte, une harpe, des cordes, un xylophone, une trompette... et les instruments faisaient des bruitages, des grincements, des cordes pincées, des percussions... J'ai trouvé ça un peu bizarre mais amusant.

L'histoire est triste: ça raconte comment au Moyen Âge des enfants, Nicolas et Étienne, rassemblent une troupe d'autres enfants pour partir en Terre Sainte depuis la France et l'Allemagne. Leur voyage à pieds est long et difficile, le Pape Innocent III n'est pas d'accord avec leur Croisade parce que ce n'est pas lui qui l'a organisée et il décide de les arrêter en leur fermant toutes les abbayes pour les empêcher trouver de la nourriture. Mais les enfants continuent leur route, montent en bateau en Méditerranée et font naufrage dans une tempête.

Les chanteurs étaient bien, notamment la mezzo qui chantait une des mères (Cornelia Oncioiu) et j'ai surtout apprécié la maîtrise: ils chantent vraiment bien pour leur âge! J'ai été impressionnée par les interventions du récitant (Didier Sandre) à la fin de chaque acte, qui racontait les événements qui ont lieu en même temps que les enfants poursuivent leur chemin: il dit vraiment bien son texte!

La mise en scène et les costumes étaient contemporains, les enfants étaient habillés comme nous, en jean et baskets, mais ça ne m'a pas dérangée. J'ai trouvé que c'était un beau spectacle."

mardi 9 décembre 2014

Anna au Donbass

Anna Netrebko a-t-elle vraiment voulu soutenir les indépendantistes du Donbass ou s'est-elle fait instrumentaliser en voulant soutenir des amis musiciens de Donetsk? Le fait est que la photo au drapeau fait beaucoup réagir sur les réseaux sociaux.

Son équipe de relations publiques a immédiatement réagi en publiant un communiqué sur sa page Facebook, mais il n'est pas certain que cela suffise à calmer les critiques.


Personnellement, je serais encline à croire à la seconde explication, ne serait-ce que pour l'air gêné d'Anna sur la photo. Elle a été peu avisée dans son geste de solidarité, elle aurait pu donner soit plus discrètement soit à meilleur parti, Unicef ou autre.

Par contre, les appels au boycott qui ont suivi sont ridicules. Personne n'est réellement lèsé par ce geste, si ce n'est Anna Netrebko elle-même. On n'est pas comme pour Tamar Iveri dans le cas d'une insulte publique à toute une communauté. Sachons raison garder.

Anna Netrebko est une grandissime artiste, espérons juste qu'elle fera preuve de plus de jugeote à l'avenir.

lundi 8 décembre 2014

Premières impressions sur le Fidelio de la Scala (#PrimaScala sur Arte)

J'ai donc craqué, et sans remords. J'ai regardé le live de la Prima sur Arte, sachant que la représentation à laquelle j'assisterai bientôt sera forcément très différente, ne serait-ce que parce que j'ai une écoute beaucoup plus attentive dans une salle d'opéra que devant la télé. Voici quand même mes premières impressions.

La mise en scène fonctionne pour moi. Le travail de Deborah Warner se tient, ne cherche pas inutilement à "choquer le bourgeois", va au bout de sa logique et surtout respecte le livret. Alors oui ils sont en jogging et baskets, mais franchement je les préfère comme ça que nus et se roulant par terre version Eurotrash!

La Fidelio/Léonore de ce soir, Anja Kampe est une bien belle héroïne, le travestissement fonctionne très bien, l'artiste est investie dans le rôle et en maîtrise toutes les facettes. Je préfère a priori une voix avec plus de métal, mais comme on n'a pas à la télé les moyens de juger de la part de la prise de son, je réserve mon opinion définitive pour le live.

La même chose vaut pour Klaus Florian Vogt. J'ai trouvé la ligne heurtée et les respirations bizarrement placées dans son "In des Lebens Frühlingstagen" mais il n'était pas aidé pas le tempo lent de Barenboim. Le timbre clair ne me gêne pas, je l'ai déjà dit. Le volume semblait un peu limité, encore une fois c'est peut être la prise de son, car mes souvenirs de Vogt en live sont ceux d'une voix qui remplit aisément la salle. En revanche je n'ai pas aimé sa façon de crier les dialogues, je les aurais aimé plus intériorisés. Mais dans l'ensemble une performance qui ne m'a pas déplu.

Par contre, Marzelline n'est pas une soubrette. Il serait bon de s'en souvenir avant de monter un cast. Elle est mimi Mojca Erdmann, elle chante joliment, mais j'entends Blondchen. Sur Florian Hoffman et Kwanchul Youn je n'ai pas d'opinion tranchée pour le moment.

Dans les j'aime pas il y a le Pizarro beuglé de Falck Struckmann, éructé de bout en bout. Ok c'est un méchant mais ça n'empêche pas la finesse. Pas de grands espoirs d'amélioration de ce côté là hélas. De même, pourquoi choisir Léonore II en ouverture? Ça ne pulse pas du tout pour une entrée en matière, je la trouve plus à sa place entre les 2 actes...

Heureusement, l'orchestre et les choeurs de la Scala sont toujours aussi superbes. Quel final! Vivement le live!

PS: j'ai trouvé les loggionisti bien sages. Leurs indignations s'expriment visiblement plus quand il s'agit d'opéra italien!

photos Teatro alla Scala

dimanche 7 décembre 2014

Wishlist de Noël

Chers parents et amis,

Ayant le bonheur de cumuler Noël et anniversaire en ces fêtes de fin d'année, je me permets, pour éviter de stocker dans mes placards des CDs et DVDs que je n'écouterai jamais mais n'ose pas jeter ni revendre (exemple de l'an passé: l'immonde CD Michel Legrand de Natalie Dessay), de prendre les devants et de faire une liste de ce qu'on peut m'offrir et de ce qu'il convient d'éviter absolument. Si ma famille peut avoir l'idée de lire ce post...

LES "J'AIME PAS" À NE M'OFFRIR SOUS AUCUN PRETEXTE:

- Natalie Dessay de l'opéra à la chanson: celui-là si quelqu'un ose je le lui fais avaler!
.

- Le Christmas in New York de Renée Fleming. J'ai trop de respect pour Renée pour vous dire ce que je pense de ce machin.

- Le même machin de Noël version encore plus kitschouille et mauvais goût signé Angela Gheorghiu (Gardian Angel - noter le jeu de mots pourri). Il y a un too much même au too much!


LES "J'AIME", DE ♡♡♡ À ♡. VOUS POUVEZ Y ALLER SANS CRAINTE, SUCCÈS GARANTI!

- Le DVD de Anna Bolena avec Netrebko, Garança, d'Arcangelo et Meli. Parce que c'est beau et que la production est superbe. Et puis Francesco et Trebs... ♡♡♡

- Le DVD d'Elektra version Salonen / Chéreau. Une révélation, et il est accompagné d'un super livre. ♡♡

- Une baby-sitter pour garder ma fille cadette le 29 janvier pour que je puisse aller voir Jonaaaas dans Andrea Chénier au ciné près de chez moi ♡

Voilà. Je croise les doigts pour que ceci soit lu avant l'arrivée des fêtes!

samedi 6 décembre 2014

Simon Boccanegra, Fenice 2014 (diffusion tv). Deux confirmations et deux découvertes

J'ai eu, tout à fait par hasard, l'occasion de visionner à la suite deux versions de Simon Boccanegra. Les casts sont similaires, l'écart entre les deux productions d'à peine un an. Et pourtant, le ressenti n'a rien à voir. L'une, Muti à Rome en 2013, laisse un sentiment d'inachevé, d'empesage, d'absence d'émotion; l'autre, Chung cette année en ouverture de la Fenice, emporte tout sur son passage: une révélation.

Premier facteur: la mise en scène. Celle de De Rosa à la Fenice libère les corps des chanteurs, leur permet de se trouver autrement que côte à côte, d'où l'intensité et le drame. Rajouter le travail superbe sur les vidéoprojections, les lumières et les mouvements de foule et vous avez un ensemble absolument irréprochable. Une vraie réussite. À côté, la mise en scène figée, corsetée de Rome, si elle n'est pas laide en soi, bridait tout jeu d'acteur, ne distillant que l'ennui.

Second facteur: le chef. Muti est fidèle à la lettre verdienne, certes, mais il crispe visiblement les chanteurs qui jettent sans cesse des regards vers la fosse. Chung, tout en proposant une vision tout aussi accomplie de l'oeuvre, les accompagne, les sertit dans un écrin orchestral miroitant, leur permet d'être vraiment ensemble dans la musique, pour un résultat émouvant et extrêmement cohérent.

Passons au cast. Deux confirmations. Premièrement, Maria Agresta est la plus belle Amelia que j'ai entendue depuis Freni. Elle a tout: la couleur de spinto, les aigus filés, les graves assurés. Elle passe avec une aisance confondante de l'angélisme à l'autorité, de la prière à l'imprécation. Elle dessine un personnage aussi attachant que subtil, son jeu étant quant à lui libéré du carcan du costume XVIe de Rome. Bravissima.

Secondo, Francesco Meli est un très bel Adorno. Son personnage de jeune homme fier, fougueux et emporté réussit à rendre sympathique et attachant cet amoureux un peu niais qu'est Adorno. L'incarnation vocale, moins tendue qu'à Rome, a muri, avec des phrasés toujours nobles et une grande palette de nuances. Il est également ici beaucoup plus émouvant qu'à Rome, son "Dammi la morte" à genoux devant le Doge est simplement déchirant. Bravissimo anche lui.

Et donc, deux découvertes (du moins pour moi). La première, le Paolo de Julian Kim. Voix noire, pleine d'autorité, italien précis... ce jeune chanteur tire de son rôle modeste un personnage de traître amoureux passionnant, préfigurant Iago. Rarement Paolo aura autant existé sur scène. Remarquable et définitivement à suivre.

La seconde (je garde le meilleur pour la fin): le rôle titre. Là où le Doge de Petean m'indifférait à Rome, celui de Simone Piazzola, même pas 30 ans (!), est tout simplement enthousiasmant. Son physique d'empereur romain, sa voix claire et sonore lui permettent de passer avec crédibilité et autorité du jeune homme amoureux du prologue au Doge / père des 3 actes suivants. Quelle maturité, c'est sidérant. Il alterne sans problème la tendresse dans le duo avec Amelia et la puissance du "e vo gridando pace" de la salle du trône. Il fait tout le prix de ce Boccanegra vénitien et j'ai hâte de pouvoir un jour l'entendre live... pourquoi pas à Paris? Mention spéciale pour le Fiesco de Prestia, très bien phrasé et qui fait penser à Van Dam. Ses scènes avec Piazzola sont de vraies réussites.

Pour finir, je vais jouer à mon petit jeu de l'impresario et faire un voeu (après tout, c'est bientôt Noël). Puis-je rêver qu'un théâtre aura l'idée de prendre le même cast et d'en faire un Don Carlo? Meli dans le rôle titre, Agresta en Elisabetta, Piazzola en Posa et Prestia en Filippo, plus une Eboli de valeur, on aurait une distribution aussi cohérente que superbe. Je croise les doigts!

mardi 25 novembre 2014

Ouverture de la saison à la Fenice

Ce jeudi, à 21h15, RAI 5 diffusera le Simon Boccanegra d'ouverture de la Fenice de Venise, avec Simone Piazzola dans le rôle titre, Francesco Meli et Maria Agresta (récents vainqueurs des Oscar della Lyrica catégorie meilleur ténor et meilleure soprano) et sous la direction du maestro Chung. 
Belle mise en scène d'Andrea de Rosa, d'après les photos mises en ligne par la Fenice.
Pour ceux qui n'ont la RAI, ce sera disponible en replay sur l'appli RAI-TV dès le lendemain. Compte-rendu de visionnage à suivre sur ce blog.

vendredi 21 novembre 2014

Soirée de gala à Rome - Simon Boccanegra de Verdi (DVD)

J'ai eu hier le plaisir de regarder la représentation de Simon Boccanegra donnée à Rome en décembre 2013, et je profite de l'occasion pour écrire ce billet, afin que tous comprennent pourquoi il est plus qu'heureux que cette maison d'opéra soit aujourd'hui sauvée.

Soirée de gala ce soir là à Rome, sous les caméras de Rai 5. Le Président de la République italienne est présent, Muti démarre en trombe par un "Fratelli d'Italia" martial, et le rideau se lève sur une production des plus traditionnelle mais esthétiquement très réussie. Plongée immédiate dans la Gênes de la Renaissance. Ne pas chercher une grande direction d'acteurs, on est dans le super classique limite planté à l'avant-scène. Mais avec Muti au pupitre, les chanteurs sont au garde à vous - regards en coin sur le chef toutes les 3 mesures - et cela laisse peu de place pour le jeu. Allons donc voir côté chant.

Commençons par le rôle titre: George Petean est un Boccanegra clair de timbre mais à la voix ronde et chaude, un peu jeune pour le rôle pour emouvoir vraiment à la dernière scène, mais bien chantant, soucieux de la ligne et des colorations. On aimerait juste un peu plus d'engagement, cela viendra sans doute avec la fréquentation du rôle.

Maria Agresta, au contraire, est une Amelia/Maria plus mûre et moins angélique que de coutume, avec des aspérités qui lui donnent du caractère. Si son "Come in quest'aura bruna" n'est pas le plus beau que j'aie entendu (réécouter Gheorghiu...), les duos avec le Doge sont émouvants et la confrontation avec Paolo dans la salle du trône pleine d'autorité. Et puis j'aime cette couleur italienne dans Verdi, question de goût.

L'Adorno de Francesco Meli, enfin. Que faire de ce personnage un peu sot, toujours à côté de la plaque et de l'action et qui comprend tout de travers, à part tenter de le bien chanter? Disons-le d'emblée, ce n'est pas le meilleur que j'aie entendu de Meli: la tessiture le gène un peu, il a tendance à forcer (est-ce l'enregistrement?)... je préfère grandement son Riccardo du Bal Masqué ou ses récents Manrico et Foscari. Mais avec ses moyens vocaux, qui ne sont pas ceux d'un Alagna ou même d'un Grigolo (on ne compare pas avec Kaufmann, car les voix sont bien trop différentes), il trace un personnage somme toute attachant, toujours bien phrasé et avec des intentions dans les nuances et dans les couleurs qui, si elles ne fonctionnent pas toujours, sont louables. Une belle performance pour un rôle qui lui convient moyennement à mon humble avis.

Pour ce qui est des comprimari, remarquable Paolo de Kelsey. Un chanteur à suivre, les moyens sont colossaux. Le Fiesco de Beloselskiy est un peu vert, les graves pas toujours justes mais la voix est belle et fait penser à Ghiaurov. À suivre également. 

Côté orchestre, Muti tire de la phalange romaine de beaux miroitements sur la mer ligure.

En conclusion, une soirée traditionnelle d'opéra avec un casting de premier plan et un grand chef, en "prime" sur une chaîne publique italienne... de ces représentations qui peuvent plaire au plus grand nombre et qu'on ne voit, hélas, jamais sur le service public français.


dimanche 16 novembre 2014

I due Foscari, second visionnage

Donc j'ai fini par réussir à revoir I due Foscari, opéra de Verdi que je ne connaissais pas du tout et dont la musique m'avait emballée lors du "live" du 17 octobre. Voici ce que j'en pense, après l'avoir revu.

I due Foscari est un opéra charnière. On est loin de Nabucco et du bel canto et déjà presque dans le ton de la Trilogie Populaire Traviata/Trovatore/Rigoletto. Ne manque qu'un livret moins obscur que la pièce de Byron et on avait un authentique chef d'oeuvre. Néanmoins, je le dis sans hésiter, cet opéra fait une entrée météoritique dans mon top verdien. Mélodies qui marquent, thèmes déclinés comme des leitmotivs, airs, ensembles: tout s'est imprimé dans ma mémoire en 2 écoutes, je pourrais déjà en chanter la moitié! J'y entends les germes de Traviata et Trovatore, mais aussi de Forza et même de Don Carlo. Bref, j'adore, et je remercie le Royal Opera House de me l'avoir fait découvrir. 

Alors, ce spectacle justement. J'ai lu des commentaires trouvant la mise en scène statique et sombre. Peut être en live, mais au cinéma ça passe très bien. Il est des mises en scènes cinégeniques et d'autres non (cf la Flûte de cet été à Aix). Celle-ci l'est, les gros plans lui donnent une grande intensité et de plus les costumes et les lumières sont superbes.

L'orcheste est, comme d'habitude avec Pappano, superlatif, coloré, engagé. Sir Tony est un grand verdien, ce n'est plus à démontrer. Et pour ne rien gâcher il bénéficie d'un magnifique trio de chanteurs.

Maria Agresta est Lucrezia Contarini. Je vous le dis d'emblée: j'adore le personnage. Une femme, une épouse, une mère, forte, déterminée, mais pas pour autant une méchante comme Lady Macbeth. Et Agresta lui rend merveilleusement justice. Ses interventions son tour à tour enragées ou déchirantes. Voilà un vrai soprano verdien, avec ses couleurs, ses raucités, ses multiples facettes. Enfin une chanteuse de caractère, corsée, qui ne laisse jamais indifférent. J'attendais ça depuis la Fabbricini, je suis comblée. 

Francesco Meli est Jacopo Foscari, son mari, celui qui pendant presque tout l'opéra passe plutôt un mauvais quart d'heure. Le metteur en scène ne l'épargne pas: il chante soit dans une cage, soit enchaîné, soit prostré au sol. Mais quel artiste! Le rôle, élégiaque, lui va à merveille, bien mieux que Manrico. La ligne, le soin donné au couleurs, aux nuances, aux phrasés et à la diction (magnifique) ne cessent d'émouvoir. Et puis, voilà une vraie couleur de ténor, ça nous change! Alors oui, l'aigu est pafois tendu et affecté d'un début de vibrato lent, mais malgré ça, je craque!

Placido Domingo enfin, le Doge Foscari, vieux père du précédent. Il a l'âge du rôle, pour une fois, et il est en forme, pas comme à Salzbourg. Non, il n'est pas baryton, la couleur reste celle d'un ténor (mais la voix de Meli étant claire, ça ne gêne pas dans les ensembles). Et il est fantastique. Poignant, émouvant comme jamais. Avec toujours cet art consommé du chant, il invente à chaque instant cette tessiture qui n'est qu'à lui, et il tient le pari, jusqu'à la scène finale qu'il termine les larmes aux yeux. Un immense artiste, que l'on souhaite pouvoir apprécier encore longtemps. 

Vivement le DVD! (oui, oui, il y en aura un, j'en suis sûre, je l'ai demandé au Père Noël)

Petit post-scritum: j'ai, grande honte à moi, oublié le nom de la basse qui chante Loredano, le méchant de l'histoire. Mais il a très bien chanté: la preuve, il se fait gentiment huer aux saluts, un peu comme à Guignol! 

Copyright des photos: Royal Opera House

samedi 15 novembre 2014

Si l'on faisait un opéra de The Lord of the Rings

Je me prends de temps en temps à échafauder des castings. Et à imaginer qu'un nouveau Wagner viendra pour faire une Tétralogie de The Lord of the Rings. Et s'il cherche une librettiste, je suis candidate!

Voici mes propositions pour faire un opéra de l'oeuvre de Tolkien, sachant que vu le nombre de rôles, il va me falloir toute la planète Opéra!

Prologue: The Hobbit

Bilbo Baggins, ténor: Yann Beuron
Gandalf, baryton: Thomas Hampson
Thranduil, the Elven King, ténor: Klaus Florian Vogt
Thorin Oakenshield, basse: Vitalij Kowaljow
Les nains de la compagnie de Thorin: divers profils, de la basse bouffe (Bombur), via le baryton jusqu'au ténor léger (Fili et Kili).
Lord Elrond, basse: Luca Pisaroni
Bard the Bowman, ténor: Bryan Hymel
Smaug the Golden, Great Worm of the North, basse: Matti Salminen

Oui, je sais, ça manque de femmes, mais je n'y peux rien si l'oeuvre n'en comporte aucune!

Première partie: The Fellowship of the Ring

Frodo Baggins, ténor: Stanislas de Barbeyrac
Gandalf, baryton: Thomas Hampson
Samwise Gamgee, ténor: Florian Laconi
Merry and Pippin, contre ténor et mezzo: Christophe Dumaux et Karine Deshayes
Legolas, contre ténor: Philippe Jarroussky
Aragorn, ténor: Jonas Kaufmann (ben oui, le héros quoi)
Boromir, baryton: Simon Keenlyside
Gimli son of Gloin, basse: Bryn Terfel
Lord Elrond, basse: Luca Pisaroni
Lady Galadriel, mezzo-soprano: Elina Garança
Lord Celeborn, ténor: Klaus Florian Vogt (réemploi, mais le rôle de roi elfe lui va si bien!)
Lady Arwen, soprano: Anja Harteros (pour le grand amour de Jonas, c'est obligé)
Saruman the White, basse: René Pape

Seconde partie, The Two Towers

Les mêmes,  plus:
Gollum, contre ténor: Franco Fagioli (hi hi hi)
Treebeard, basse: Matti Salminen (je peux le réutiliser, Smaug est mort durant le prologue!)
Theoden, King of the Mark, basse: Alain Vernhes
Grima Wormtongue: Dominique Visse
Eomér, ténor: Torsten Kerl
Eowyn, soprano: Kristīne Opolais (elle aurait un look d'enfer en Vierge guerrière!)
Faramir, ténor: Francesco Meli (le couple improbable avec Opolais! Mais bon on est dans l'opéra fiction)

Troisième partie, The Return of the King

Les mêmes, plus:
Denethor, baryton: Matthias Goerne
The Witch King of Angmar, basse: Eric Halfvarson

Et choeurs, ensembles, une scène large comme celle du Grosse Festspielhaus et un metteur en scène très heroic fantasy comme Robert Lepage.

Le chef? Christian Thielemann.

Alors, qu'en pensez-vous? 😉

jeudi 13 novembre 2014

En défense de Klaus Florian Vogt


Lors de mes (nombreuses) pérégrinations sur YouTube, il m'est souvent arrivé, sur des vidéos de performances de Klaus Florian Vogt, de lire des commentaires aussi méchants qu'injustes. C'est un triste florilège, généralement commis par des gens qui n'ont jamais chanté une note.

Combien d'autoproclamés "experts" oublient qu'un artiste, du moment qu'il respecte l'oeuvre et en propose une vision, doit toujours être respecté? Qu'on aime ou pas cette voix adolescente, étrange s'il en est, on ne peut nier que l'interprète a des choses à dire dans Wagner, Beethoven et même Bernstein. On peut préférer un autre timbre, une autre couleur, dire "je n'aime pas", mais pas un définitif et ma foi bien sot "c'est nul".

La voix de Vogt n'est, à mon avis, pas phonogénique. Elle s'apprécie réellement live, où son volume et sa couleur ne cessent de surprendre. Comme tout le monde, il se rate parfois: je l'ai entendu il y a quelques années au Deutsche Oper de Berlin en Cavaradossi, et l'absence totale d'italianité et de ligne puccinienne m'ont franchement gênée, même si la puissance et le volume y étaient.

Mais sinon, en Lohengrin, en Florestan, j'affirme qu'on peut sans être incohérent apprécier également Vogt et Kaufmann; que les 2 visions sont valables et que la comparaison est aussi impossible que vaine. Et je me réjouis d'avance d'aller entendre ce même Vogt à la Scala en décembre et suis bien certaine que son "Gott" saura me faire frémir comme y parvient si bien celui de Jonas.

Klaus Florian Vogt "In fernem Land" Lohengrin : http://youtu.be/gcSq3R6PzOg


mercredi 12 novembre 2014

Angela Gheorghiu au TCE... être seule ou mal accompagnée

Donc, dimanche soir, je me réjouissais du coup d'envoi de ma saison de concerts, avec le récital d'Angie G au TCE.

À peine étais-je un peu inquiète de cet orchestre totalement inconnu et de cet obscur ténor roumain dont j'avais trouvé sur YouTube des extraits de performances peu convaincants.

Mais bon, Angie pour 35 euros, pourquoi se priver?

Et bien, hélas, mes inquiétudes étaient justifiées. L'orchestre, sans grâce, faisait autant de pains qu'une boulangerie, sans compter des bois sans aucune distinction et des cordes grasses.

Le ténor, annoncé souffrant, n'aurait même sans cela pas eu grand chose à dire. Aucun legato, pas d'idées,  plus l'aphonie qui m'avait été épargnée sur YouTube. Pourquoi dès lors le faire chanter en solo, massacrer Otello et Lohengrin? Déjà qu'il gâchait les duos...

Sinon, Angie fut égale à elle-même: voix moirée, art de la demi teinte, piani filés... et changement de toilettes et coiffures x3 (du rose princesse au noir andalouse).

Beaucoup de regrets donc, et je m'interroge sur l'opportunité de retourner écouter ce genre de récitals cacheton, au programme hétéroclite et à l'accompagnement au rabais.
Bon, après de longues hésitations, je me lance.
Ce blog sera dédié au partage de mes émotions artistiques diverses et variées. J'espère vous communiquer mon enthousiasme!