mercredi 21 janvier 2015

Don Giovanni in the City - Opéra de Paris 20 janvier 2015

Premier spectacle de la saison 2014-2015 pour moi hier à l'Opéra de Paris: la reprise, revue et corrigée pour Bastille, du Don Giovanni mis en scène par Michael Haneke, avec en bonus la reprise du rôle titre par Erwin "Bogoss" Schrott.

Sur cette mise en scène, il a été écrit beaucoup de mal comme de bien. Personnellement, je n'ai rien contre les transpositions modernes tant que les partis pris fonctionnent. Et dans ce cas précis je trouve que c'est le cas. La transposition de la lutte noblesse / serviteurs, hommes / femmes à la vie de bureau se tient, en tous cas j'y ai retrouvé des références qui me parlent, moi qui y ai mon quotidien de cadre surbookée. De même, le jeu d'acteur assez poussé m'a séduite, même s'il se fait au détriment de la tension musicale en créant des temps morts entre les récitatifs. Rien de choquant donc, une mise en scène intelligente, pas laide et qui donne autrement à réfléchir que certaines mises en images empoussièrées.

Côté orchestre, Alain Altinoglu prend trop son temps à mon goût, mais il est vrai que les silences imposés par la mise en scène n'aident pas à maintenir la tension dramatique. De même, ses tempi fluctuants ont créé de nombreux décalages avec le plateau à l'acte 1, c'est dommage. Heureusement, tout ce petit monde s'est retrouvé à l'acte 2 et la seconde partie était très réussie.

Côté chanteurs, on passera sur le ténor chevrotant et assourdi de Stefan Pop, qui a transformé chaque intervention d'Ottavio en supplice pour mes pauvres oreilles. Moi qui adore les 2 airs, j'en suis venue à regretter que ce ne soit pas la version de Prague qui n'en comporte qu'un! Une prestation assez indigne d'un opéra de premier plan. On espère pour ce chanteur qu'il ne s'agit là que d'une méforme passagère. De même, le Leporello de Adrian Sâmpetrean est peu sonore, falot, et rate totalement son Catalogue, le comble. Heureusement que la mise en scène ne lui demande pas de se mettre en avant.

Dans les plus, la très belle Zerlina de Serena Malfi, sonore et bien phrasée. Presque surdimensionnée. Le Masetto d'Alexandre Duhamel aurait sans problème été à sa place en Leporello. Que n'ont-ils échangé les 2 chanteurs!

Elvire sèche et un peu triste de Marie-Adeline Henry, à la voix indurée et raide, mais qui se rattrape avec un "Mi tradi" habité et très émouvant. Anna un peu trop véhémente de Tatiana Lisnic, qui mange ses partenaires dans les ensembles mais décoiffe dans Non mi dir. Sur le Commendatore de Liang Li, dur de juger car la voix est amplifiée. C'est de la triche!

Reste donc le Don de la soirée. Soyons honnête, j'étais venue pour lui. ERWIIIIIIIN Schott, mon Leporello préféré dans la version de Guth, que j'entendais pour la première fois live et dans le rôle titre. La voix est surprenante de projection. Elle remplit sans problème le grand vaisseau de Bastille. Elle est aussi ronde et chaude, avec comme corollaire un côté un peu lourd qui embarrasse la vocalise. Mais elle en impose, le "La" optionnel du final est glorieux et le crooning de latin lover fonctionne à fond. Si l'artiste était un peu plus scrupuleux sur la mesure et ne rajoutait pas des notes... par contre, les récitatifs sont fantastiques. Joués, dits, comme rarement. Schrott est une bête de scène. Rien n'existe quand il est là, sa présence avale tout. Un Don Giovanni magnétique, sensuel, uniformément pervers mais terriblement séduisant. Je craque!

Dans les coups de gueule: après la splendeur de la Scala, Dieu que Bastille parait moche, froid et sans charme! Et ce public de catharreux qui se racle la gorge sans retenue et applaudit n'importe quand... et une mention spéciale sur le Wall of Shame pour le club sandwich lilliputien à 12 euros du bar, à chaque saison plus petit et plus cher!

[Photos © Vincent Pontet]

3 commentaires:

  1. Je suis tout à fait d'accord avec ton article. On y est allées le même soir! Il y avait des problèmes de plateau et surtout des décalages flagrants au premier acte, j'étais gênée pour le chef d'orchestre. :D
    Comme toi j'apprécie tout à fait les mises en scène moderne, je pense que Mozart aurait été tout à fait pour en plus. Mais là ça manquait vraiment de dynamisme et de cohérence. Bien sûr Erwin Schott était transcendant en DSK alcoolique.
    Par contre moi j'ai adoré Tatiana Lisnic! Sa voix était bien plus claire que les autres, d'ailleurs on l'entendait nettement plus dans les ensembles. C'est la seule à m'avoir donné des frissons.

    En tout cas, ça ne restera pas dans mes représentations préférées. J'ai nettement préféré La Bohème et La Traviata! C'est dommage car je n'ai pas tellement l'occasion d'aller à l'opéra, question de budget bien sûr! Je vois que tu as la chance d'y aller souvent, profite. :)

    Jolie découverte ton blog!

    Bonne journée

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    1. Merci de tes encouragements! Ça fait plaisir :)
      Concernant DG, je précise : j'ai beaucoup aimé Lisnic en tant que telle, je trouve juste que faute de collègues ayant autant de puissance qu'elle, il aurait fallu qu'elle retienne un peu les chevaux dans les ensembles, pour qu'ils soient équilibrés!

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  2. Modernes bien sûr*
    Mon rhume me rend moins vigilante ^^

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