samedi 7 février 2015

Grande Messe à réveiller les morts!

Seconde soirée de la semaine à la Philharmonie de Paris, pour un Requiem de Berlioz prometteur, avec l'Orchestre National du Capitole de Toulouse, l'Orfeón Donostiarra, Bryan Hymel et Tugan Sokhiev à la baguette.

Il s'agit d'une oeuvre de jeunesse de Berlioz (numéro d'opus 5), elle n'est donc pas ce que je préfère chez lui, mais elle se prête magnifiquement à ce génial outil qu'est la Philharmonie. La phalange toulousaine renforcée d'une batterie de timbales supplémentaires (j'en compte 8) et aux pupitres tous au complet s'y épanouit sans saturation, le détail reste présent, les couleurs se discernent sans peine. Spatialisés au 4 coins de la salle, les cuivres supplémentaires (trompettes, trombones et tubas) font un effet fantastique (mon oreille droite - ils étaient à 4 rangs derrière moi - s'en rappellera!). Le choeur peut quant à lui oser toute une palette de nuances sans être perdu dans l'espace de la salle, ça "sonne" magnifiquement et avec une grande clarté... mais c'est aussi une clarté qui ne pardonne pas.

Il y a eu récemment, via un collectif lyrique, une polémique sur la trop grande présence de choeurs amateurs sur la scène de la Philharmonie. Précision : ayant été 10 ans choriste amateur dans le Choeur Régional Vittoria d'Ile de France, ayant collaboré avec de grands orchestres, enregistré avec eux et même gagné une Victoire de la Musique, je sais toute la qualité dont est capable un choeur amateur bien préparé. Mais je sais aussi ses limites: celles de la technique vocale, et notamment chez les ténors. Dans une musique aussi exigeante vocalement que Berlioz pour ce pupitre, des ténors sans technique vocale professionnelle comme ceux de l'Orfeón Donostiarra font un peu triste figure. Ce n'est pas la première fois que je le constate: j'avais assisté à Pleyel à une Damnation de Faust où j'avais eu le même sentiment. Pour Berlioz, il faut des pros. Certes, l'Orfeón ne démérite pas, c'est une musique difficile, mais j'ai été vraiment gênée par les attaques savonnées et le manque de lyrisme dû selon moi aux difficultés techniques qu'il éprouve et qui du coup l'empêchent d'émouvoir. C'est très dommage dans une oeuvre qui repose quasi entièrement sur les épaules du choeur.

Reste le moment de grâce de la soirée : le Sanctus de Bryan Hymel. On sait quel merveilleux interprète de l'opéra français il est, et notamment ses affinités avec Berlioz. Il fut hier soir absolument miraculeux. Le timbre, argenté, la ligne parfaitement maîtrisée malgré la tessiture impossible de ce solo, le volume de la voix qui remplit la salle... une émotion infinie et une ovation méritée. Quel grand chanteur! On ne peut que se réjouir de le voir à l'affiche de la Damnation de Faust en décembre prochain à l'Opéra de Paris.

Je continuerai quant à moi mon cycle "économie de moyens et intimisme" avec le Te Deum de ce même Berlioz en juin!

2 commentaires:

  1. Bonjour Élise,

    Il existe quand même des chœurs amateurs pourvus d'excellents pupitres de ténor — il est vrai que c'est un paramètre capital pour la couleur et la souplesse d'un chœur, surtout dans des partitions aussi tendues. Donostiarra est irrégulier (selon les générations recrutées, je suppose), du tendu et faux (comme dans Guercœur) au glorieux (comme dans la fameuse Deuxième de Mahler de Lucerne).

    Mais le Chœur de l'Orchestre de Paris est irréprochable de ce point de vue : aussi bien sonores que capables de dégradés en voix mixte, le niveau individuel est remarquable (c'est plus sur la rapidité solfégique que sur la qualité vocale que la différence se fait, en réalité, donc ça ne s'entend pas lors du concert). Chose amusant, si l'on écoute leurs enregistrements d'il y a trente-cinq ans, on s'aperçoit qu'alors le recrutement était beaucoup moins performant (dans leur Damnation de Faust avec Barenboim, tous les aigus sont ouverts !).

    Dans les plus petites formations, celui de L'Argentière m'a beaucoup impressionné dernièrement.

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  2. Totalement d'accord concernant le choeur de l'Orchestre de Paris, qui est vraiment remarquable!

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