mercredi 11 mars 2015

Chostakovitch et falbalas!

Soirée de gala hier à la Philharmonie de Paris, pour la venue d’Anne-Sophie Mutter et de l’orchestre du Concertgebouw, sous la direction d’Andris Nelsons : le directeur de la Philhar’ était au 1er rang du balcon, aux côtés de Gautier Capuçon et tout le monde s’était mis sur son 31. Il faut dire qu’il y avait de quoi, vu les interprètes et le programme (concerto pour violon de Sibelius et 10e symphonie de Chostakovitch) et le résultat fut largement à la hauteur des attentes !

Sculpturale dans un fourreau de satin noir à bustier libérant ses magnifiques épaules, brushing blond au vent, la grande Anne-Sophie déployait toute la passion de son jeu hyper romantique, dans un concerto-duel avec l’orchestre, survolté par la direction très dynamique de Nelsons. Habituée à la sobriété de Salonen dans ce répertoire, j’eus un peu de mal à adhérer au début à cette vision très contrastée de l’œuvre, mais au final, après la surprise initiale, je dois dire que ce fut une bien belle exécution. Bon, j’avoue, c’était la première fois que je voyais ce chef live et j’ai été un peu déconcertée par sa direction très physique : il m’est arrivé plus d’une fois pendant le concerto de me demander s’il n’allait pas, au détour d’un des amples mouvements de ses longs bras, éborgner sa soliste ! Heureusement pour le beau visage de Mutter, il est droitier et elle était à sa gauche ! Justement ovationnée à la fin de sa performance, elle revint et nous gratifia, en bis, d’une partita de Bach de toute beauté.

Après la pause, la phalange batave, renforcée d’instrumentistes supplémentaires, enchaînait sur la 10e de Chostakovitch. Je ne suis pas une grande connaisseuse de ce compositeur (hormis le concerto avec piano et trompette, quelques préludes et la Valse), mais live et avec un tel orchestre ça décoiffe ! Mon Chosta-maniaque de mari m'ayant coachée sur l’œuvre depuis plusieurs jours, je repérai sans problèmes dans les mouvements la « signature » du compositeur : D-(e)S-C-H (ré, mi bémol, do, si), déclinée sous toutes les formes, notamment aux timbales dans le grand final. La précision et le sens des contrastes d’Andris Nelsons, magnifiés par ce formidable écrin qu’est la Philharmonie et qui permet de tout entendre, jusqu’à la plus infime intention, firent merveille. Les pupitres de vents et de cuivre du Concertgebouw étaient tout simplement fantastiques ; la précision des cordes (l’unisson sur les pizzicati) impressionnante. Quel orchestre ! Sans surprise, après l’apothéose finale, la salle leur fit un triomphe mérité. Vivement qu’ils reviennent !

PS : j’ai appris le même jour que M. Jean Nouvel intente un procès à la Philharmonie pour que son nom ne soit pas associé à la salle, au prétexte qu’elle n’est pas achevée. Qu’il vienne donc entendre comme elle sonne et quel succès elle remporte auprès de celui pour qui elle a été voulue et qui l’a payée : le public, et il comprendra à quel point les excès auxquels le porte son égo sont ridicules et puérils. La Philharmonie est sans doute sa plus belle réussite, en dissocier son nom pourrait devenir sa plus grande erreur.

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