samedi 13 février 2016

Ça pétille à Séville! Il Barbiere di Siviglia | ONP 12/02/2016

Reprise heureuse que celle du spectacle imaginé par Damiano Michieletto, surtout en ces pluvieuses journées de février! Voilà une soirée qui devrait être remboursée par la Sécu tant on en sort heureux et plein d'entrain! Dans une grande maison qui tourne sur elle-même, tout un petit monde s'agite, vit, chante et danse avec un allant qui fait plaisir à voir et qui nous change vraiment du statisme d'autres mises en scène vues récemment à l'ONP. C'est un petit morceau d'Almodovar, un soleil d'Espagne, avec ses couleurs, ses bruits, des détails, de la vie... viva la Movida!

Dès l'ouverture d'ailleurs le ton est donné : dirigeant depuis son pianoforte, Giacomo Sagripanti nous ciselle une texture orchestrale pétillante, précise et légère, un vrai plaisir. Du Rossini champagne! La suite est du même tonneau: toujours attentif au plateau, Sagripanti ne couvre jamais les chanteurs, maintient l'équilibre entre ceux, comme Alaimo, capables de toutes les virtuosités et ceux, comme le jeune Figaro du jour (Alessandro Arduini), qu'il faut parfois attendre un peu pour éviter les décalages. De la bien belle ouvrage, quand on sait combien Bastille est inadapté à Rossini (Cenerentola la saison prochaine sera d'ailleurs donné à Garnier et c'est une très bonne chose).

Passons au cast: il est dominé par un couple d'amoureux splendides de jeunesse et de peps. Lui, Lawrence Brownlee, cascadeur autant par la voix (quel superbe "Cessa di piu resistere"!) que dans le jeu, dont on admire la classe, la manière dont il affronte crânement toutes les difficultés du rôle tout en grimpant, sautant, courant sans jamais montrer le moindre signe de fatigue. Chapeau bas. Elle, Pretty Yende, dont c'étaient les grands débuts à l'ONP, est une adolescente rebelle à peu près idéale, et une fantastique Rosina version soprano. Le choix est assumé: tout est broderies, variations,  coloratures et contre-notes. C'est beau, rond, délicat... et la chanteuse a un tel charme, qu'elle conquiert instantanément le public de Bastille, qui l'ovationne même en plein milieu d'"Una voce poco fa". Un conseil: allez l'entendre l'an prochain dans Lucia!
Grandioses aussi, le couple de compères Bartolo/Basilio. En docteur grincheux et abusif, le colossal Nicola Alaimo rappelle s'il était besoin qu'il est inégalable actuellement dans les rôles de basse-bouffe, avec notamment une virtuosité incroyable dans le duo avec Rosina, de la haute voltige! Ildar Abdrazakov, dont on connaissait déjà la voix de stentor, révèle ici une verve comique que personnellement je ne lui soupçonnais pas et qui explose dans cette mise en scène. Ces deux-là volent la vedette au rôle titre, le Figaro un rien timide d'Alessandro Arduini. La voix est jolie, bien conduite, mais elle n'est pas particulièrement remarquable et son Figaro dandy semble toujours en retrait: c'est Almaviva qui mène la danse, quand ce devrait être l'inverse... j'ai presque plus remarqué le beau Fiorello de Pietro di Bianco: joli timbre, puissance... j'espère le revoir bientôt dans un rôle plus important.

Je conclurai avec la (bonne) surprise de la soirée : la Berta géniale d'Anaïs Constans! En plus de très bien chanter son air, elle dessine tout au long de l'opéra un personnage de femme en mal d'amour désopilant, dont on applaudit le succès final quand elle parvient à attraper son homme. C'est une superbe performance d'actrice en plus de la performance de chanteuse.

Ovation méritée pour cette soirée anti-déprime où la musique de Rossini a été si bien servie!

PS: il est triste de voir encore une fois le chef, sur scène, saluer avant que les lumières se soient rallumées une fosse quasi vide. Messieurs-dames les musiciens de l'orchestre de l'ONP, par respect pour vos collègues artistes encore sur scène et pour le public qui vous applaudit, ne pourriez-vous attendre cinq minutes pour partir, que le rideau soit tombé? Franchement, on ne voit ça qu'à l'ONP, ça exaspère les habitués et surprend très défavorablement les néophytes. À bon entendeur?

Photos Opéra de Paris

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