dimanche 23 juin 2019

Le sommet de la saison 2018/2019 | Iphigénie en Tauride, Théâtre des Champs-Elysées, 22/06/2019

Il est des spectacles dont la perfection ne souffre aucune réserve. La première d'Iphigénie en Tauride hier au TCE est de ceux-là. Rien ne pèche, tout est pertinent, à sa place, lumineux, émouvant. On en ressort bouleversé, changé.


La mise en scène de Robert Carsen d'abord. Sobre, lisible, sans cesse en mouvement, avec ces danseurs qui miment le chœur (qui lui est en fosse) ce tombeau noir où le destin des Atrides s'écrit à la craie blanche et s'efface par les larmes. Epure à l'Antique mais d'une intense modernité.


L'orchestre, le chœur et leur chef, ensuite, enlevés, colorés, vivants, rendant chaque détail de cette dentelle qu'est la musique de Glück, où aucune note n'est anodine ou superflue. Mention spéciale au hautbois solo, d'une douceur extraordinaire, et au cors naturels, remarquables de justesse.


Les chanteurs, enfin, avec une distribution de référence, la plus belle réunie depuis la gravure essentielle de Minkowski. Merveilleuse Iphigénie de Gaëlle Arquez, qui maîtrise la tessiture meurtrière du rôle, entre soprano et mezzo, la prosodie, avec une phrase longue, conduite avec précision et intensité mais sans forcer, la diction noble et précise et les couleurs surtout, alternant raucités et douceur, dardant les aigus, faisant sonner des graves sépulcraux. Elle m'a tiré des larmes. Et quelle présence! Quel art de se mouvoir parmi les danseurs! Cette performance de haute lignée, elle la partage avec Stéphane Degout, chez qui on retrouve les mêmes qualités. La voix de velours à la projection toujours remarquable, l'élégance royale de la ligne, la diction superlative, l'intensité du personnage, la grâce enfin, quand soulevé par les Euménides il marche sur les murs du tombeau. Il est du sang des Dieux! Excellente surprise que le Pylade de Paolo Fanale, dont le français ne dépare pas et qui se sort d'un rôle qui sollicite beaucoup le grave avec noblesse. Il tire le meilleur des magnifiques airs offerts par la partition. Thoas sanguinaire à souhait d'Alexandre Duhamel, dont j'avais déjà beaucoup apprécié le Golaud. Beaux comprimari, avec mention spéciale à la Diane de Catherine Trottmann, que j'ai vu entrer avant tout le monde, à la droite de mon strapontin du 1er balcon, et dont la divine intervention met un terme monumental à cette tragi-comédie grecque. Un chanteuse qu'on souhaiterait retrouver rapidement dans un rôle plus long!


Encore une fois mille fois merci au TCE pour l'exigence et de la qualité de sa programmation. Et un mot pour le public: courez-y, ce n'était pas plein hier et c'est à ne rater sous aucun prétexte!

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