vendredi 21 novembre 2014

Soirée de gala à Rome - Simon Boccanegra de Verdi (DVD)

J'ai eu hier le plaisir de regarder la représentation de Simon Boccanegra donnée à Rome en décembre 2013, et je profite de l'occasion pour écrire ce billet, afin que tous comprennent pourquoi il est plus qu'heureux que cette maison d'opéra soit aujourd'hui sauvée.

Soirée de gala ce soir là à Rome, sous les caméras de Rai 5. Le Président de la République italienne est présent, Muti démarre en trombe par un "Fratelli d'Italia" martial, et le rideau se lève sur une production des plus traditionnelle mais esthétiquement très réussie. Plongée immédiate dans la Gênes de la Renaissance. Ne pas chercher une grande direction d'acteurs, on est dans le super classique limite planté à l'avant-scène. Mais avec Muti au pupitre, les chanteurs sont au garde à vous - regards en coin sur le chef toutes les 3 mesures - et cela laisse peu de place pour le jeu. Allons donc voir côté chant.

Commençons par le rôle titre: George Petean est un Boccanegra clair de timbre mais à la voix ronde et chaude, un peu jeune pour le rôle pour emouvoir vraiment à la dernière scène, mais bien chantant, soucieux de la ligne et des colorations. On aimerait juste un peu plus d'engagement, cela viendra sans doute avec la fréquentation du rôle.

Maria Agresta, au contraire, est une Amelia/Maria plus mûre et moins angélique que de coutume, avec des aspérités qui lui donnent du caractère. Si son "Come in quest'aura bruna" n'est pas le plus beau que j'aie entendu (réécouter Gheorghiu...), les duos avec le Doge sont émouvants et la confrontation avec Paolo dans la salle du trône pleine d'autorité. Et puis j'aime cette couleur italienne dans Verdi, question de goût.

L'Adorno de Francesco Meli, enfin. Que faire de ce personnage un peu sot, toujours à côté de la plaque et de l'action et qui comprend tout de travers, à part tenter de le bien chanter? Disons-le d'emblée, ce n'est pas le meilleur que j'aie entendu de Meli: la tessiture le gène un peu, il a tendance à forcer (est-ce l'enregistrement?)... je préfère grandement son Riccardo du Bal Masqué ou ses récents Manrico et Foscari. Mais avec ses moyens vocaux, qui ne sont pas ceux d'un Alagna ou même d'un Grigolo (on ne compare pas avec Kaufmann, car les voix sont bien trop différentes), il trace un personnage somme toute attachant, toujours bien phrasé et avec des intentions dans les nuances et dans les couleurs qui, si elles ne fonctionnent pas toujours, sont louables. Une belle performance pour un rôle qui lui convient moyennement à mon humble avis.

Pour ce qui est des comprimari, remarquable Paolo de Kelsey. Un chanteur à suivre, les moyens sont colossaux. Le Fiesco de Beloselskiy est un peu vert, les graves pas toujours justes mais la voix est belle et fait penser à Ghiaurov. À suivre également. 

Côté orchestre, Muti tire de la phalange romaine de beaux miroitements sur la mer ligure.

En conclusion, une soirée traditionnelle d'opéra avec un casting de premier plan et un grand chef, en "prime" sur une chaîne publique italienne... de ces représentations qui peuvent plaire au plus grand nombre et qu'on ne voit, hélas, jamais sur le service public français.


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